par Aline Sultan
in AROUTS SHEVA
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Henryk Goldszmit est né en Pologne, à Varsovie, le 22 juillet 1878 au sein d’une famille juive bourgeoise et assimilée. A l'âge de cinq ans, il confia à sa grand-mère qu'il désirait transformer le monde pour qu'il n'y ait plus d'enfants pauvres. Il a 18 ans à la mort de son père et la responsabilité de la famille retombe sur ses épaules. A 20 ans, il écrit son premier roman et participe à un concours littéraire sous le pseudonyme Janusz Korczak.
Dans un profond désir d'apporter ses soins aux enfants, il s'engage dans des études de médecine, mais cela ne l’empêche pas de continuer d’écrire et il publiera régulièrement des essais et des romans traitant souvent de la misère des enfants. En 1905, il devient célèbre avec la publication des ‘enfants de salon’.
Ses études terminées, il est mobilisé dans l’armée russe en tant que médecin militaire.
De retour du front, il travaille dans un hôpital pour enfants démunis de Varsovie, ouvre son propre cabinet et acquiert rapidement la réputation d’un médecin extrêmement dévoué et passionné. Parallèlement, il prend part à des colonies de vacances et sa vocation d’éducateur s’affirme peu à peu. Il rêve déjà de créer un endroit idéal pour les enfants pauvres.
En 1910, une fois les fonds nécessaires regroupés, il débute la construction de ‘La Maison des Orphelins’, qui sera inaugurée en 1912, 92 rue Krochmalna, à Varsovie. Durant la construction, il effectue plusieurs voyages d’études en Europe, et son orphelinat deviendra l’un des plus beaux d’Europe.
Janusz Korczak adopte des idées pédagogiques d’avant-garde et crée une sorte de "république" gérée par les enfants, avec leur son propre ‘Parlement’, leur ‘Tribunal’ et leurs journaux d’enfants. L’orphelinat accueille des enfants juifs, garçons et filles. Rapidement, Korczak abandonne son poste à l’hôpital, afin de se consacrer entièrement à son orphelinat.
En 1914, il est de nouveau mobilisé et restera quatre ans sur le front, où il écrira ses célèbres traités de pédagogie : ‘Comment aimer un enfant’ et Moments pédagogiques’ Durant cette période, il rencontre Maryna Falska, qui dirige un refuge pour enfant errants.
En 1919, Maryna Falska crée un refuge pour les orphelins de la guerre près de Varsovie. Janusz Korczak en prend la direction pédagogique.
Janusz Korczak est encore une fois mobilisé et nommé dans un hôpital réservé à des gens atteints de maladies infectieuses. Il y attrape le typhus, échappe de justesse à la mort, mais sa mère, qui était venue à son chevet, est contaminée et mourra de cette maladie. Korczak se remettra difficilement de la mort de sa mère, mais il prendra le dessus, en grande partie grâce à la réussite des orphelinats qu’il dirige et où il applique ses idées pédagogiques.
Il crée un personnage ‘Mathias’, ‘un enfant roi’ dont les aventures ont été publiées dans le monde entier. Korczak enseigne également à l’Institut pédagogique et à l’Université et exerce en tant qu’expert auprès du Tribunal pour jeunes délinquants dont il prend la défense.
En 1928, paraît "Le droit de l'enfant au respect", qui inspirera les principes des Droits de l'enfant qui furent reconnus par la Convention des Nations Unies en 1989.
Il crée une revue rédigée essentiellement par des enfants et des adolescents, publie des codes de respect des droits des enfants et des pièces de théâtre. En 1934, il répond à l’invitation d’un de ses anciens protégés et se rend en Erets Israël où il goûtera à l’expérience du kibboutz.
De retour, il anime des émissions de radio (‘les causeries du Vieux docteur’) durant deux années, mais en 1936, elles sont interrompues et il est privé de sa fonction auprès du Tribunal.
Il envisage de quitter le pays et de partir en Erets Israël, mais il ne peut pas se faire à l’idée d’abandonner les enfants en si grande détresse.
En 1939, Varsovie est assiégée par les nazis. Korczak revêt son uniforme d’officier polonais malgré les risques que cela comporte et il se refuse obstinément à porter l’étoile jaune.
En 1940, son orphelinat est déménagé et réinstallé dans le ghetto de Varsovie. Korczak affronte la Gestapo, lutte au jour le jour pour nourrir ses enfants et se bat de toutes ses forces pour préserver leur dignité. Il tiendra ainsi durant deux ans et relatera l'histoire de cette période dans son "Journal du ghetto" qui a été conservé par miracle et publié après sa mort.
Juillet 1942, Korczak sent que la fin approche et il fait jouer aux enfants une pièce de théâtre ayant pour thème une réflexion sur la mort d’un enfant. En août 1942, les nazis proposent au Vieux docteur de quitter le ghetto, mais Janusz Korczak refuse d’abandonner ses 200 enfants et le 22 Av, après les avoir apprêtés et après avoir distribué un morceau de pain et une bouteille d’eau à chacun, il marchera en tête de ses enfants, accompagné de ses infirmières en tablier blanc, jusqu’aux trains qui les conduiront à Treblinka où ils seront exterminés dès leur arrivée.
Les enfants le suivirent, confiants. Un des témoins raconta : «Ce ne fut pas une marche vers les wagons de la mort. Ce fut une manifestation silencieuse contre le meurtre !… Tous les enfants se rangèrent par groupes de quatre, Korczak en avant, la tête haute, deux enfants à la main…»
Principes des Droits de l'enfant selon Janus Korczak :
- L'enfant a droit à l'amour ("Aimez l'Enfant, pas seulement le vôtre")
- L'enfant a droit au respect ("Demandons le respect pour les yeux brillants, les fronts lisses, pour l'effort juvénile et la confiance. Pourquoi des yeux ternes, un front ridé, des cheveux gris ... ou une résignation fatiguée exigeraient-ils un plus grand respect ?")
- L'enfant a droit aux conditions les meilleures pour sa croissance et son développement ("Nous demandons que soient supprimés la faim, le froid, l'humidité, les odeurs nauséabondes, le surpeuplement")
- L'enfant a le droit de vivre dans le présent ("Les enfants ne sont pas les personnes de demain, ils sont des personnes aujourd'hui")
- L'enfant a le droit d'être lui-même ou elle-même ("Un enfant n'est pas un billet de loterie destiné à gagner le gros lot")
- L'enfant a le droit à l'erreur ("Nous renonçons au désir illusoire d'avoir des enfants parfaits")
- L'enfant a le droit d'avoir des secrets ("Respectez leurs secrets")
- L'enfant a le droit d'être pris au sérieux ("Qui demande son avis ou son consentement à l'enfant ?")
- L'enfant a le droit d'être apprécié pour ce qu'il est ("L'enfant, étant petit, a peu de valeur marchande")
- L'enfant a le droit de désirer, de réclamer, de demander ("Avec les années, le fossé entre les demandes des adultes et les désirs des enfants s'élargit progressivement")
- L'enfant a le droit à "un mensonge, une tromperie, un vol occasionnel"
- L'enfant a le droit que l'on respecte ses biens et son budget ("Chacun a le droit de faire respecter sa propriété, quel qu'en soit le peu d'importance ou de valeur")
- L'enfant a le droit à l'éducation
- L'enfant a le droit de résister aux influences éducatives qui entrent en conflit avec ses croyances ("Il est heureux pour le genre humain que nous soyons incapables de forcer les enfants à céder aux coups portés à leur bon sens et à leur humanité")
- L'enfant a le droit de protester contre une injustice ("Nous devons en finir avec le despotisme")
- L'enfant a le droit d'avoir un Tribunal des enfants où il peut juger et être jugé par ses pairs ("Nous sommes les seuls juges des actions de l'enfant, de ses mouvements, de ses pensées... Un Tribunal des enfants est indispensable... dans 50 ans, pas une seule école, pas une seule institution n'en seront dépourvues")
- L'enfant a le droit d'être défendu dans un système de justice spécialisé dans l'enfance ("L'enfant délinquant est encore un enfant...")
- L'enfant a le droit que l'on respecte son chagrin ("Ne serait-ce que pour la perte d'un caillou")
- L'enfant a le droit de mourir ("Le profond amour de la mère pour son enfant doit lui laisser le droit de mourir prématurément... Tous les arbrisseaux ne deviennent pas des arbres")